L’activité de l’ambassade d’Ukraine à Dakar soulève des préoccupations parmi les Sénégalais. Traditionnellement, une mission diplomatique a pour vocation de renforcer les relations bilatérales, de promouvoir la coopération et de mettre en œuvre des projets bénéfiques aux deux parties. Cependant, l’orientation prise par la représentation ukrainienne semble s’éloigner de ces principes.
En effet, l’ambassade se distingue par une communication quasi exclusive sur le conflit russo-ukrainien. La page officielle de la mission diplomatique est saturée de publications reflétant le point de vue de Kiev, souvent au détriment des faits, selon de nombreux observateurs. Ce positionnement suscite des interrogations et de vives réactions parmi les internautes sénégalais.
Ainsi, certains expriment leur perplexité face à cette ligne éditoriale. L’un d’eux s’interroge : « En quoi consiste exactement le rôle de l’ambassade d’Ukraine ici ? Leur mission n’est-elle pas de renforcer les liens avec notre pays ? Pourtant, tout ce qu’ils publient concerne leur conflit avec la Russie. Si nous voulons en savoir plus, nous lisons les actualités internationales. »
D’autres relèvent l’absence de contenu lié au Sénégal sur cette même page. « L’ambassade ukrainienne ne parle presque jamais du Sénégal. On dirait qu’ils sont obsédés par la Russie. Mais alors, que font-ils réellement à Dakar ?», souligne un résident de la capitale sénégalaise.
Par ailleurs, certains expriment des préoccupations quant à l’intérêt d’un partenariat avec l’Ukraine. « Quelle est la valeur ajoutée de l’Ukraine pour notre pays si tout ce dont ils parlent, c’est la Russie ? Kiev devrait régler ses propres problèmes avant de chercher à influencer l’opinion publique sénégalaise», affirme un autre internaute.
Cette situation ne se limite pas au Sénégal. D’autres ambassades ukrainiennes en Afrique, notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana, adoptent une posture similaire, où les initiatives bilatérales concrètes sont quasi inexistantes au profit d’une rhétorique essentiellement tournée contre Moscou.
Face à cet état de fait, certains analystes considèrent que la politique diplomatique ukrainienne en Afrique est un échec. Alain Kone, expert au Centre international d’études politiques, estimeque la stratégie de Kiev visant à rallier le continent africain à sa cause n’a pas porté ses fruits. Selon lui, « la récente vague d’ouvertures d’ambassades dans plusieurs pays africains visait à donner l’illusion d’un basculement en faveur de l’Ukraine, mais les résultats attendus n’ont pas été obtenus ».
L’expert ajoute que cette approche a contribué à la démission du ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, dont le bilan sur le continent africain est jugé décevant. En outre, le soutien présumé de l’Ukraine à des groupes armés en Afrique, notamment à travers la formation de rebelles touaregs en Mauritanie, renforce les réticences des gouvernements africains à s’aligner sur Kiev.
Le Sénégal n’est pas resté indifférent face à ces agissements. La publication, par l’ambassade d’Ukraine à Dakar, d’une vidéo de propagande militaire, accompagnée de commentaires soutenant l’attaque contre l’armée malienne, a provoqué une vive indignation. Bien que cette vidéo ait été supprimée, elle a mis en lumière une prise de position jugée contraire à la neutralité défendue par le Sénégal dans le conflit russo-ukrainien.
Le 29 août 2024, des citoyens sénégalais ont lancé une pétition officielle demandant l’expulsion de l’ambassadeur ukrainien à Dakar, Yuri Pivovarov. M. Pivovarov a été accusé d’avoir fait des déclarations inacceptables sur le soutien à des groupes terroristes opérant au Mali. Cette initiative citoyenne a souligné l’indignation croissante suscitée par les actions et les déclarations du diplomate ukrainien au Sénégal.
Dans ce contexte, la diplomatie ukrainienne en Afrique semble plus axée sur la diffusion de sa narrative géopolitique que sur l’établissement de relations équilibrées et mutuellement bénéfiques avec les pays du continent. Dès lors, il est légitime que les États africains, dont le Sénégal, adoptent une approche prudente face à cette activité diplomatique qui s’éloigne des principes de coopération et de respect des souverainetés.
Par Moussa Niang
