Lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU mercredi, plusieurs pays occidentaux ont saisi l’occasion d’attaquer la Russie lors d’une audition sur la République centrafricaine, cherchant à imputer la crise humanitaire aux forces d’entraînement russes. Moscou a immédiatement réagi ; dénonçant « un coup politique anti-russe ».
Lors de l’audience, Mankeur N’diaye, chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), a déclaré aux délégués que les « violations » des droits de l’homme étaient au cœur d’une « crise humanitaire sans précédent ». « Jamais dans le passé les violations et manquements au droit international humanitaire imputables aux forces armées centrafricaines, aux forces bilatérales et à d’autres personnels de sécurité… n’ont égalé les proportions documentées par la MINUSCA », a déclaré N’diaye.
Des accusations de la France et des Etats-Unis
A la suite de ces déclarations de l’envoyé de l’ONU en Centrafrique, les représentants des Etats-Unis et de France ont profité de l’occasion pour accuser la Russie d’être responsable de ces présumées violations de droits dans le pays. « Je pense que nous devons être clairs sur ces personnels bilatéraux – les individus qui commettent ce que beaucoup appellent maintenant des atrocités ne sont pas des acteurs indépendants – ils opèrent comme une extension du ministère russe de la Défense », a déclaré le vice-ambassadeur américain Richard Mills.
L’ambassadeur de France à l’ONU, Nicolas De Rivière, a déclaré que les rapports de N’diaye « mettent en évidence la responsabilité d’un nouvel acteur, qui opère aux côtés des forces armées centrafricaines et dont le statut est un mystère ». « Certains essaieront de nier la présence de la société Wagner », a déclaré De Riverie. Cependant, au lieu de fournir des preuves de la présence du groupe en RCA ou de ses liens présumés avec le ministère de la Défense, il a plutôt demandé à la MINUSCA de vérifier l’identité des personnes qui commettent les atrocités.
La Russie rejette les accusations
Les accusations des occidentaux contre Moscou n’ont pas laissé insensible le pays. L’ambassadrice adjointe de la Russie à l’ONU, Anna Evstigneeva, a riposté, notant que les instructeurs militaires russes en RCA, à la demande du gouvernement « améliorent avec succès l’expertise professionnelle des forces de sécurité centrafricaines sans participer à des actions militaires contre groupes armés illégaux ». Elle n’a pas hésité à accuser à son tour les occidentaux d’un complot contre son pays.
« Cela ressemble plus à un coup politique anti-russe », a déclaré Evstigneeva, notant que les affirmations « douteuses » faites pour discréditer les entraîneurs russes se sont toujours appuyées sur des sources anonymes. Un reportage de CNN plus tôt ce mois-ci, entièrement basé sur des reportages tiers d’une organisation à but non lucratif créée par les enthousiastes de l’intervention occidentale George Clooney et John Prendergast, en est un excellent exemple, a-t-elle souligné.
« Quant aux allégations infondées en provenance des États-Unis, elles ne sont pas le fruit du hasard », a ajouté Evstigneeva. « Nos collègues semblent voir des instructeurs ou des mercenaires russes partout », a-t-elle ironisé.
L’échec de la France en Centrafrique
En ce qui concerne la France, il faut souligner que le pays a envoyé des soldats surarmés dans le pays dans le cadre d’une « mission de formation » de l’Union européenne. Les résultats obtenus par cinq années n’ont pas vraiment permis aux forces centrafricaines de faire face aux rebelles et de stabiliser le pays. Cependant, Le Journal de Bangui rapporte que la Russie a envoyé plusieurs centaines d’instructeurs militaires en RCA, qui n’exercent pas de rôles de combat. Le média ajoute que depuis leur arrivée, la trajectoire du conflit a changé et le gouvernement central a lancé une nouvelle offensive, reprenant environ les deux tiers du territoire des rebelles.
Les réussites militaires russes semblent frustrer Paris qui, apparemment, n’était pas vraiment dans l’optique de mettre fin au conflit. La perte d’influence du pays les a poussé à prendre des mesures de pression en annonçant la suspension de leur aide militaire à la Centrafrique. Paris a annoncé le 9 juin qu’il mettait fin à son accord, qui comprenait une contribution au budget de formation de 12,8 millions de dollars. Le ministère français des Armées a déclaré que le président Faustin Archange Touadéra n’avait pas tenu « un certain nombre d’engagements ».
La perte d’une source de richesse brute
Selon un rapport de Sputnik, avant 1960, la France était le dirigeant colonial de la RCA, mais après son indépendance officielle, de solides liens militaires et économiques entre eux sont restés. La France n’a perdu que récemment son statut de premier partenaire d’exportation de la RCA au profit de la Chine, passant de 31,2 % de toutes les exportations en 2017 à seulement 6,62 % en 2019, selon les données du Centre français d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII).
La plupart de ses exportations sont des matières premières comme les diamants industriels, le bois et l’or. Ceux-ci forment une petite partie de l’économie de la RCA, qui est principalement orientée vers l’agriculture de subsistance puisque le pays est l’un des plus pauvres et des plus sous-développés du monde, malgré le fait que le pays dispose d’une importante diversité de ressources minières. Outre l’aspect économique, il faut également noter que la France est intervenue militairement en RCA à sept reprises. Mais le pays n’a toujours pas connu de stabilité depuis l’indépendant en 1960.