Dans la soirée du jeudi 2 Mai, la cour constitutionnelle du Bénin a rendu public les résultats provisoires des législatives du 28 avril dernier. Dans la liste des 83 élus du peuple, on constate l’entrée de nouvelles têtes ainsi que l’absence de certaines figures qui ont marquées l’histoire politique du Bénin depuis bientôt trois décennies.
Le verdict de l’institution Djogbenou n’a ni longtemps duré, ni changé le fil des résultats précédemment annoncés par la Commission électorale nationale autonome (CENA). Depuis l’avènement du renouveau démocratique au Bénin, plusieurs personnalités politiques connues pour non seulement une certaine régularité à l’hémicycle mais aussi pour avoir brigué le perchoir de l’institution de contre-pouvoir. Curieusement, à la 8ème législature, elles sont toutes absentes. Focus sur les grands absents de la huitième législature. Elles sont entre autres 4 anciens et un vice-président de l’institution.
- Adrien Houngbedji: Président sortant de la mandature actuelle, Adrien Houngbedji est un homme clé de la vie politique béninoise. De retour à l’exil lors de la conférence nationale de 1990, il crée le Parti du renouveau démocratique (PRD), le seul d’ailleurs qui existe après 25 ans d’animation de la vie politique du Bénin. Le charismatique leader des Tchoco-Tchocos est le seul à avoir brigué le perchoir à trois reprises dès l’avènement de la démocratie. Président de la 1erè législature (1991-1995) il récidive à la 3ème législature après avoir passé la main à Bruno Amoussou à la 2ème législature. Après avoir conduit de main de maître et soutenu la réforme du système partisan dotant le Bénin d’un nouveau code électoral et une nouvelle charte des partis politiques, le parti arc-en-ciel (1996-1998) n’a pas pu, pour des raisons de formalités administratives participer aux législatives du 28 avril dernier. Une première dans l’histoire politique du Bénin.
- Bruno Amoussou: Le charismatique leader des « Adjas » n’est plus à présenter. Président de la 2ème législature (1995-1999), Bruno Amoussou surnommé « le renard de Djakotomey » à une carrière politique aussi riche que celle de son compagnon Adrien Houngbédji. Président-fondateur du Parti Social-démocrate (PSD), il a dirigé d’autres grands regroupements politiques dont l’Union fait la Nation (UN) et l’Alliance pour une dynamique démocrate (ADD). Ministre d’État, du Plan, de la prospective et du développement de 1999 à 2005, il a Plusieurs fois participé sans succès aux élections présidentielles. L’homme a joué aussi un rôle important dans la réussite de la réforme du système partisan. Aujourd’hui, il est considéré comme la personnalité morale de l’Union Progressiste (UP), parti sorti majoritaire des législatives passées. Indétrônable dans le Couffo, il a encore confirmé son statut de leader en raflant 5 des 6 sièges en compétition dans la 11ème et 12ème circonscription électorale que constitue le département du Couffo.
- Antoine Idji Kolawolé: Compagnon fidèle de Bruno Amoussou, Antoine Idji Kolawole est un acteur politique clé du plateau. Avant son arrivé à la présidence du parlement entre 2003 à 2007 (4ème législature), l’homme de 73 ans a été chef de la diplomatie béninoise (ministre des Affaires étrangères) de 1998 à 2003 sous le régime Mathieu Kerekou 1. Influent dans le plateau, il est aujourd’hui membre du bureau politique de l’Union Progressiste.
- Mathurin Coffi Nago: Professeur d’Université, il a connu une ascension rapide en politique de par son titre de deuxième personnalité du Bénin pendant 8 années. Même si en 2007, il parait l’inconnu au perchoir pour la majorité des béninois, le natif de Bopa avait à son actif un mandat électif à l’hémicycle. Mathurin Coffi Nago est la seule personnalité politique béninoise à briguer deux fois de suite la tête de l’Assemblée nationale. Dans la foulée, il annonce son retrait de la course aux législatives passées après une rencontre avec son Etat-major politique à Bopa le samedi 26 janvier 2019.
- Eric Louis Camille Houndeté: Seul dans le lot à ne pas accéder au perchoir de l’Assemblée nationale. Mais a dirigé des sessions en tant que deuxième personnalité de l’institution. Élu plusieurs fois député, Eric Houndeté est connu pour ses prises de positions au sein de l’hémicycle et surtout sur des questions cruciales qui touchent à la vie de la nation dont les lois des finances et les reformes de révisions constitutionnelles. Anciennement membre influent du parti Force Clé de Lazard Sèhoueto, il rompt les rangs avec son camarade sur la candidature unique de l’alliance UN pour la présidentielle de 2016. Le premier vice-président de l’Assemblée apporte son soutien au candidat des FCBE, Lionel Zinsou avant de rejoindre officiellement le parti de Boni Yayi en 2019. L’élu de la 5ème circonscription électorale a été un acteur clé dans les deux échecs cuisants qu’a subi le régime Talon sur le dossier de la révision constitutionnelle.
Au-delà de tout ce qu’on peut leur reprocher, ces acteurs ont joué chacun de son côté un rôle capital pour la sauvegarde des libertés publiques chèrement acquises en 1990.