Politique

Bénin: « il est très dangereux de ne pas avoir de contre-pouvoirs dans un pays », Gilles Yabi

Dans un entretien accordé vendredi 17 mai 2019 à Ouestaf News, l’analyste politique et fondateur du think tank Wathi, Gilles Yabi est revenu sur le contenu de la lettre ouverte adressé au président Patrice Talon par la communauté scientifique internationale au lendemain des élections législatives controversés du 28 avril dernier. Il a appelé les différents acteurs impliqués à un «examen des pratiques politiques» et à « l’ouverture d’un dialogue » inclusif pour une  rapide sortie de la crise politique qui secoue le pays depuis quelques semaines.

Les élections législatives du 28 avril dernier avaient indigné bon nombre d’observateurs de l’actualité politique nationale. Une élection où pour la première fois depuis l’avènement du renouveau démocratique, seuls deux partis proches du régime au pouvoir avaient pris part.

Ne voulant pas rester en retrait de cette situation inédite, la communauté scientifique internationale avait adressé une lettre ouverte au président de la République Patrice Talon pour lui demander d’annuler le scrutin législatif et d’organiser de nouvelles élections législatives ouvertes à tous les partis politiques. Au nombre des éminents signataires de cette correspondance, figure  l’analyste politique Gilles Yabi. Dans un court entretien accordé vendredi 17 mai à Ouestaf News, président du Comité directeur du think tank citoyen, Wathi est revenu sur le contenu de la lettre et a exprimé son indignation face au recul du système démocratique béninois très envié dans la sous-région. « C’est un recul démocratique, c’est incontestable. C’est la raison pour laquelle j’ai signé cette lettre ouverte. On a vu venir cette dégradation de la tradition de dialogue politique au Bénin et c’est clair qu’avoir une Assemblée nationale qui va siéger pendant quatre ans sans des représentants de l’opposition cela ne cadre pas avec les habitudes démocratiques du Bénin depuis la conférence nationale ( en février 1990, NDLR ) », s’est-il désolé.

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Selon ses dires, l’objectif de cette lettre ouverte est « qu’il fallait trouver les moyens politiques pour organiser de nouvelles élections législatives qui permettent à tous les partis qui le souhaitent de se présenter », mais avec l’intransigeance qu’a fait montre le chef de l’Etat en maintenant le processus électoral et où notamment les députés issus de ce scrutin à polémique ont été installés dans leur fonction jeudi dernier, «  il faut sans doute réadapter le message » sans pour autant perdre de vue le but visé ; celui d’apaiser les tensions devenues très tendues au lendemain de ces élections controversées. Cela passe, explique-t-il par  «  un dialogue politique avec tous les acteurs de manière à ce qu’on trouve d’autres moyens de faire en sorte qu’il y ait des contre-pouvoirs pendant les prochaines échéances »  « Il reste important de signaler qu’il est très dangereux de ne pas avoir de contre-pouvoirs dans un pays. On a non seulement vu l’absence de l’opposition mais aussi des violences, des morts, pour la première fois au Bénin à l’occasion d’une élection », a-t-il fait remarquer.

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Et pour ce qui est des dispositions très décriées de la nouvelle loi électorale notamment l’introduction de la charte des partis politiques, l’économiste a eu une réponse tranchée sur la question.  « (…) Il y a eu effectivement une nouvelle charte des partis politiques et un nouveau code électoral qui ont introduit des mesures plus restrictives pour l’existence des partis politiques, pour leurs activités, notamment électorales. Je crois que la vraie question (réside) plutôt dans la pratique du pouvoir. Il y avait une vraie volonté du côté du pouvoir de contrôler absolument l’Assemblée nationale. (…) Je crois que la vraie question, c’est de faire l’examen des pratiques politiques réelles dans le pays et de réfléchir sur des réformes institutionnelles qui soient largement partagées ; qui soient également applicables de manière impartiale », a-t-il conclu.

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