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De misère à la richesse, voici l’histoire vraie de Jack Ma, PDG d’Alibaba

Derrière le grand succès de l’ère numérique que constitue Alibaba, il y a un homme : Jack Ma, son fondateur. Certains le comparent à Steve Jobs, d’autres à Bill Gates. L’intéressé, lui, se sent des affinités avec Forrest Gump.

Jack Ma, PDG d’Alibaba, l’homme qui a changé la vie des Chinois

Comme l’étourdi obsédé par la pêche aux crevettes, le fondateur d’Alibaba.com et de Taobao.com s’est toujours focalisé sur l’usager, au pays des entreprises d’Etat toutes-puissantes.

Dans le Guide officiel du succès, sur Alibaba.com, l’entrepreneur star de la Chine se trouve des points communs avec le héros incarné par Tom Hanks : « Forrest Gump n’est pas un type intelligent, mais il est obstiné. Il n’est pas talentueux mais très, très travailleur. Et il est simple et opportuniste. »

Dans le cas de Jack Ma, nul ne doute toutefois de l’intelligence de l’homme qui domine l’ensemble du commerce en ligne en Chine.

Ma est une histoire vraie de misère à la richesse. Il a grandi dans la pauvreté dans la Chine communiste, deux fois échoué à son examen d’entrée à l’université, et a été rejeté par des dizaines d’emplois, avant de trouver le succès avec sa troisième entreprise internet, Alibaba.

PRISE DE RECUL

Aujourd’hui, M. Ma a pris un peu de champ par rapport à son « bébé ». Le 10 mai 2013, alors que son site le plus emblématique, celui de vente aux particuliers, Taobao (« La chasse aux trésors »), fêtait son dixième anniversaire, il avait abandonné ses fonctions de directeur général d’Alibaba.

A 48 ans, il avait décidé de prendre ses distances, arguant que la « prochaine génération des gens d’Alibaba est mieux équipée » pour gérer un tel « écosystème ».

Mais, après avoir gagné 3,4 milliards de dollars, selon le magazine américain Forbes, il a continué néanmoins à suivre la destinée de son groupe dont il est resté le président.

C’est qu’au fond, Ma Yun – qui s’est choisi le prénom Jack en anglais – n’est pas seulement cet homme d’affaires dont le succès suscite un nombre impressionnant de biographies – La Philosophie de la vie de Ma, La Logiqueentrepreneuriale de Ma, Penser comme Ma, Ma a dit, La Décennie Ma, etc.

MAIGRICHON MAIS BAGARREUR

« Jack est intéressé par tout, de la vie professionnelle à sa famille, de la spiritualité à l’observation de la nature, dit son ami Orville Schell, directeur du centre sur les relations sino-américaines Asia Society. Ce n’est pas quelqu’un qui veut rester PDG d’une entreprise pour l’éternité et construire toujours plus haut. »

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Jack Ma n’a jamais cherché la fortune pour la fortune. Il voulait l’innovation, pour ce qu’elle change dans la vie des gens, ce qui fait de lui un des rares milliardaires chinois populaires.

Ma Yun vient d’une famille modeste. Ses jeunes années sont marquées par la Révolution culturelle. Il est maigrichon mais bagarreur et ne craint pas les défis.

« Je n’avais jamais peur des ennemis plus grands que moi », se souviendra-t-il plus tard.

Il échoue par deux fois à entrer à l’université, se voit refuser des jobs dans l’hôtellerie à cause de sa petite taille. Professeur d’anglais pendant cinq ans dans un institut d’électronique de Hangzhou, la capitale de sa province natale, l’industrieuse Zhejiang, il monte en 1994 une agence de traduction comme il en existe une multitude en Chine, baptisée Haibo.

 »J’ai échoué 3 fois à l’université. J’ai postulé 30 fois pour avoir un boulot mais j’ai toujours été rejeté. Quand KFC est venu en Chine pour la première fois, nous étions 24 à postuler et j’étais le seul à être rejeté. Je voulais rentrer dans la police et sur 5 postulants, j’étais le seul à ne pas être accepté. J’ai postulé 10 fois pour rentrer à l’université d’Harvard aux USA et j’ai été rejeté ».

LA DÉCOUVERTE D’INTERNET

C’est aussi grâce à son niveau d’anglais qu’il accompagne une délégation d’officiels à Seattle, aux Etats-Unis, en 1995. Il s’agit de négocier avec un investisseur américain la construction d’une autoroute. Ce voyage sera initiatique.

M. Ma y découvre Internet. Il effectue une première requête sur un moteur de recherche, les mots « bière » et « Chine ». Aucun résultat.

De retour à Hangzhou, il a acquis la conviction que la Chine ne peut pas passer à côté du Web. « Je ne comprenais pas de quoi il parlait. Il pensait qu’Internet représentait l’avenir de notre société et le répétait autour de lui », se souvient Zhang Hong, une amie rencontrée en 1993. Elle est alors son étudiante mais reprendra plus tard l’agence de traduction.

Jack Ma lance alors Chinapages, un service de pages jaunes en ligne qui ne rencontrera pas le succès escompté et qu’il abandonne en 1997. Le ministère du commerce lui propose de participer à la création de sites facilitant les affaires. Il monte à Pékin, où il est rejoint par certains anciens élèves.

C’est en 1999, après quelques années passées dans la capitale, qu’il crée, dans sa province d’origine, Alibaba, un site mettant en relation les entreprises avec les fournisseurs adaptés.

Le site est lancé depuis un petit appartement, avec dix-sept collaborateurs. Dont Trudy Dai, aujourd’hui vice-présidente chargée des ressources humaines de ce groupe de 24 000 employés : «Alibaba est une entreprise guidée par sa mission, avec à sa tête un groupe de personnes qui partagent le même rêve et la même vision. »

SITE POUR LES PARTICULIERS

Alibaba est un succès, porté par l’entrée de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce. Mais Jack Ma a déjà un autre projet, un site pour les particuliers.

Devant un parterre de pros de la Silicon Valley, à Stanford, en octobre 2011, le petit homme au visage émacié et en polo jaune rentré dans le pantalon se souvient des réactions à l’époque : « Tout le monde m’a dit « Oh mon dieu! Tu vas entrer sur le terrain d’eBay ». J’ai répondu : « Et pourquoi pas ? » »

Résultat : sur seize millions de colis livrés chaque jour en Chine, dix millions ont été commandés sur Taobao ou sa version destinée aux grandes marques, Tmall.

Jack Ma sait que les Chinois ne cherchent pas à gagner un produit aux enchères mais plutôt à dénicher les bonnes affaires. Et il ne ponctionne pas les petits commerçants pour leur donner accès à la plateforme.

« Ce que les Chinois admirent chez lui, c’est son caractère pionnier au service des besoins populaires », juge Liu Shiying, son biographe.

Pour le consommateur qui craint de se faire voler en payant en ligne, il crée Alipay, un système de blocage du versement sur un compte tiers.

DES HAUTS ET DES BAS

Mais cette relation connaît des hauts et des bas. Les petits commerçants se sentent trahis lorsque M. Ma lance Tmall, où sont rassemblées les grandes marques.

Le 10 octobre 2011, il augmente les frais annuels d’entrée sur cette plateforme inspirée du centre commercial. Passant de 6 000 (743 euros) à 60 000 yuans, dix fois plus, prenant les plus modestes à la gorge, et provoquant une manifestation de ces commerçants devant le siège de Taobao.

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Le héros venu d’en bas a su écarter de Chine les géants eBay et PayPal et il se targue de « soutenir plus de 50 millions de PME » grâce à ses plateformes.

Avant de prendre, l’an dernier, ses distances avec les commandes au jour le jour d’Alibaba, M. Ma avait déjà, en 2012, passé une majeure partie de son temps aux Etats-Unis pour « penser, se relaxer, reprendre le golf ».

Alors qu’il incarne le rêve chinois, lui a son rêve américain : « Il admire cette ouverture qui conduit à l’innovation », pense Orville Schell. Cet ami estime qu’en vieillissant, M. Ma se pose des questions sur le sens des choses.

« Jack est quelqu’un qui cherche toujours à inventer le prochain chapitre de sa vie, dit M. Schell. Comme beaucoup de ces gens qui sont dans une quête, son objectif n’est pas clair, pas explicite, il ne peut tout simplement pas tenir en place. »

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